Lire Michel de Certeau (1926-1986) aujourd’hui est sans doute l’une des meilleures introductions à l’étude de la spiritualité et de la mystique. Chez les spirituels et les mystique modernes, « l’expérience » emporte par surprise et porte à aller plus loin sans cesse, dans l’excès de leur désir. L’audace de la foi, écrivait Certeau, « consiste à vouloir aller jusqu’au bout des tensions et des ambitions propres à un temps ; à prendre au sérieux un réseau d’échanges pour y attendre et y reconnaître l’avènement de Dieu ». (La Faiblesse de croire, p. 54). Tout autant, l’aventure des mystiques modernes offrait à Certeau un prisme pour lire le mouvement de l’expérience spirituelle de la dernière partie du XXe siècle, déliée de toute croyance en Dieu (La fable mystique I, p. 411). Est-il possible, à notre tour, de lire l’expérience spirituelle contemporaine avec Certeau ?
En partant de ses premières études sur les jésuites français Pierre Favre (1506-1546) et Jean-Joseph Surin (1600-1665), nous explorerons la conception de l’expérience spirituelle de Certeau à partir de La faiblesse de croire et de La fable mystique, et lirons sa manière de comprendre les quêtes spirituelles au travers du quotidien. Nous nous attacherons également, dans un dialogue critique, à des théologiens, sociologues ou historiens contemporains en dialogue avec Certeau.